Publié le: 9 mars 2018

Soif de formation, valeur du travail

CORÉE DU SUD – Classé pays en développement dans les années 1960, le «pays du matin frais» ne doit pas son succès à l’aide au développement, mais à des réformes capitalistes.

Une blague d’analyste Asie: en juillet 1961, le gouvernement japonais soutenait mordicus qu’il serait impossible de développer une économie indépendante en Corée du Sud. Dans les années 1950, après la guerre de Corée, force était de constater que les progrès économiques étaient proche du zéro absolu. Le revenu par habitant traînait à 79 dollars en 1960 – l’un des plus bas au monde. Mais depuis, tout a complètement changé.

Contrastes immenses

Aujourd’hui, la Corée du Sud est un pays capitaliste doté d’un confortable PIB de 27 539 dollars par habitant, devenu le huitième plus grand pays exportateur au monde, devant l’Espagne (26 609), la Russie (8929), le Brésil (8727) et la Chine (8113). Les produits issus des sociétés coréennes comme Samsung, Hyundai et LG sont connus dans le monde entier. Et cette année, le microcosme des sports d’hiver s’y retrouve pour les Jeux Olympiques. Et le Nord communiste? Des estimations vagues pour la Corée du Nord placent le produit intérieur brut à 583 dollars par habitant. Et cela n’en finit pas, des milliers de Nord-Coréens meurent de faim. Selon l’«Index of Economic Freedom 2017», la Corée du Sud est l’un des 25 pays les plus libres du monde, se classant au 23e rang, devant l’Allemagne (26) et le Japon (40), par exemple. La Corée du Sud a même marqué 90,6 points sur 100 dans la catégorie Libre entreprise. À titre de comparaison: la Corée du Nord se situe au 180e rang, la toute dernière place du classement. Dans l’espace «Business Freedom», elle ne reçoit que 5 points sur 100 possibles.

De la pauvreté au capitalisme

La réponse à la question de savoir comment la Corée du Sud a pu se développer est fondamentalement assez simple: tout était rare. Après la Seconde Guerre mondiale et la Guerre de Corée, le Sud n’était qu’un vaste champ de ruines. Le pays était surpeuplé, il n’y avait pas d’industrie et le commerce fonctionnait comme il le faisait un siècle auparavant. C’est précisément cet état généralisé de pauvreté qui a conduit le pays sur la voie capitaliste.

«C’EST LE MANQUE DE TOUT QUI A POUSSé LA CORéE DANS LES BRAS DU CAPITALISME.»

Sur le plan culturel, l’éducation demeure l’un des principaux moteurs du développement de la Corée. Avec environ 20%, le budget de l’éducation est le poste le plus important du budget de l’État. Cette proportion n’a guère changé au cours des trois dernières décennies. Et ce n’est là qu’un investissement gouvernemental. À cela s’ajoutent les dépenses privées considérables d’environ 3% du revenu national, la Corée du Sud est donc le leader mondial des dépenses liées à l’éducation.

Écoles privées de première classe

La Corée du Sud dispose d’une structure d’économie de marché beaucoup plus forte que celle que l’on trouve dans la plupart des autres pays, en particulier dans le domaine de l’éducation. Environ 80% des universités sont privées. La qualité de ces universités y est excellente. Huit universités coréennes figurent parmi les 100 universités les plus innovantes du monde. La KAIST University of Technology a été la seule université non américaine à figurer dans le Top 10.

Les écoles privées jouent également un rôle important dans le système scolaire. Il y a près de 100 000 écoles privées de soutien scolaire (Hagwon) et 77% des élèves consacrent en moyenne 10,2 heures supplémentaires par semaine – en plus des cours normaux. Les familles consacrent en moyenne 800 dollars par mois à l’éducation privée de leurs enfants. En 2001, toutes les écoles primaires et secondaires étaient déjà connectées à Internet, chacun des 340 000 enseignants disposait de son propre ordinateur et, en 2003,
14 «cyberuniversités» étaient connectées à l’Internet.

La croissance se poursuit

Les 51 millions d’habitants de la 
Corée du Sud comptent encore parmi les travailleurs les plus actifs au monde. Au cours des cinq dernières années, le produit intérieur brut a augmenté d’environ 3% par an. Le même taux de croissance est attendu pour 2018. Bien que l’inflation reste inférieure à 2%, le taux de chômage est demeuré stable à 3,8%. La Corée du Sud, qui était encore un pays en développement dans les années 1960, n’a pas atteint la prospérité par le biais de l’aide au développement, mais par des réformes capitalistes. Les marchés libres, la soif d’éducation et la diligence font merveille. Le pays du repos matinal est tout sauf au repos.

Henrique Schneider,

directeur adjoint de l’usam

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