Publié le: 8 février 2019

Valoriser le tissu économique des régions de montagne

Le tissu économique des régions de montagne et des régions périphériques de la Suisse se caractérise par son originalité. À rebours de la moyenne nationale, la prospérité de ces régions couvrant deux tiers du territoire de la Confédération repose en grande partie sur le secteur secondaire. Cette spécificité engendre d’importants défis pour la politique, chargée d’assurer aux populations de la montagne et des zones rurales des conditions de vie et de travail adaptées, alors même que le territoire est soumis à de profondes mutations. C’est un chiffre qui peut étonner: aujourd’hui dans nos régions de montagne, 30% des personnes actives travaillent dans le secteur secondaire, contre seulement 20% dans le reste de la Suisse. Les régions alpines, préalpines et jurassiennes de notre pays bénéficient donc particulièrement de la présence dynamique de l’industrie et de l’artisanat. Cette réalité bouscule bien des idées-reçues sur les espaces ruraux. Nous les considérons parfois comme des régions presque exclusivement agricoles – alors que seulement 4,1% des actifs des régions de montagne travaillent dans le secteur primaire – ou encore comme des Mecque du ski, entièrement tournées vers le tourisme – même si le secteur tertiaire, certes dominant, y prend moins de place qu’en comparaison nationale (66% des actifs contre 78% dans le reste de la Suisse). Ces images d’Épinal ne rendent pas justice à l’extraordinaire dynamisme et diversité du tissu économique des régions de montagne, qui font la part belle à la production industrielle et artisanale.

Les entreprises qui composent ce tissu doivent faire preuve d’inventivité afin de subsister face à la concurrence. Le recrutement de personnel qualifié, la proximité de filières de formation en adéquation avec les besoins du marché, mais aussi l’évolution rapide de l’image véhiculée sur les régions de montagne, notamment en lien avec le réchauffe­ment climatique, sont autant de défis auxquels elles sont confrontées. Depuis 75 ans, le Groupement suisse pour les régions de montagne (SAB) s’investit afin de défendre ce paysage économique. Afin de le maintenir en bonne santé, nous encourageons notamment l’innovation, dont ces entreprises sont friandes: une étude de la Haute école de Lucerne démontre que les PME des régions de montagne devancent leurs homologues du plateau dans l’innovation de produits et l’innovation des processus.

La numérisation offre de ce point de vue des opportunités intéressantes. Car elle permet de développer des nouveaux produits, des nouveaux services, des nouveaux processus d’entreprise, mais aussi de s’affranchir de la problématique de l’éloignement géographique. L’enjeu de la mobilité et de l’accessibilité d’une entreprise se trouve ainsi redéfini. Le Groupement suisse pour les régions de montagne insiste donc pour que les régions périphériques ne soient pas oubliées en ce qui concerne les infrastructures numériques. L’approvisionnement de base des vallées doit comprendre un raccordement à la fibre optique de 10 mégabits par seconde. En outre, nous demandons que les réseaux à très haut débit, y compris les réseaux 5 G, soient également déployés dans les périphériques.

Enfin, la compétitivité régionale doit être augmentée par l’amélioration de la qualité de la main d’œuvre disponible. Pour cela, il faut assurer des opportunités de formation et de formation continue, mais aussi offrir aux familles et aux jeunes un cadre de vie attrayant et culturellement riche, ainsi qu’un approvisionnement de base pour tous les services publics qu’ils nécessitent pour s’épanouir. Les régions périphériques sont des lieux de travail. Il faut saluer l’engagement de la Confédération, qui s’implique fortement dans le renforcement des conditions-cadres des régions de montagne. Sa nouvelle politique régionale (NPR), entrée en vigueur en 2008, cherche à renforcer l’esprit d’entreprise, la création de valeur ajoutée et l’innovation. La stimulation de la compétitivité des régions et la création d’emploi est au centre de son dispositif, qui a grandement profité à l’industrie des régions de montagne. La deuxième période d’impulsion 2016-2019 de la NPR se concentre à nouveau sur l’industrie, plus spécifique­ment sur les systèmes régionaux d’innovation (RIS), ainsi que sur le tourisme. Près de 210 millions de francs à fonds perdus, ainsi que 400 millions de francs sous la forme de prêts fédéraux, sont à disposition.

Les régions périphériques de notre pays ne sont pas un musée à ciel ouvert. Ce sont des lieux de travail, de culture et de vie. En 2015, les régions périphériques incluses dans la NPR totalisaient un peu plus de deux millions d’emplois équivalents plein-temps, en augmentation moyenne de +0,7% par an depuis 2011. Le secteur secondaire représentera encore à l’avenir une part essentielle de ces emplois. Reconnaissons donc la richesse de ce tissu économique original et défendons-le, en accompagnant son évolution et son développement.

*Conseillère nationale (PDC/FR),

présidente du Groupement suisse

pour les régions de montagne (SAB).

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