Publié le: 30 août 2024

«Nous voulons beaucoup d’emplois»

AgriCO – Le site broyard de Saint-Aubin (FR), propose de nombreuses surfaces pour des projets

dédiés aux foodtechs et agrotechs. Les start-up peuvent y lancer leurs recherches, y compris en pleine terre,

développer des produits et les commercialiser. Mélanie Costinas responsable du site, parle de son développement.

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JAM: Parlez-nous de la stratégie et du positionnement du site?

Mélanie Costinas: Nous dépendons du département de l’économie et de l’emploi du canton de Fribourg. En octobre 2020, l’Établissement cantonal de promotion foncière a été créé afin de gérer les sites qui ont été acquis: le site de Saint-Aubin, celui de Romont (Tetrapack) et un terrain à Marly. Nous sommes en train de regarder si d’autres sites industriels doivent être rafraîchis ou rénovés afin d’y accueillir des entreprises. Notre objectif est de créer des emplois. Nous en avons 120 actuellement à Saint-Aubin et à terme, nous devrions en avoir 1600.

Des limites?

Nous ne pouvons pas accueillir des entreprises qui gèrent des dépôts avec d’immenses surfaces et très peu de collaborateurs. Il faut un certain nombre d’emplois, en fonction du type de production. Quand une entreprise est intéressée, nous travaillons avec la promotion économique pour analyser si cette entreprise s’intègre dans la stratégie du site et combien d’emplois seront créés.

De quelle surface disposez-vous?

Aujourd’hui, nous avons 280 000 m2 de terrain industriel sur lequel on peut construire. À cela s’ajoute 100 hectares (1 000 000 m2) de terrain agricole. Une entreprise qui fait de la recherche peut avoir besoin de procéder à des essais en laboratoire, en serre ou dans un terrain agricole. Nous avons déjà quelques entreprises qui utilisent cette possibilité. Et c’est le seul endroit en Suisse où il est possible de tout faire sous un même toit. C’est notre valeur ajoutée et c’est notre stratégie.

Sur la maquette, on trouve des zones colorées. À quoi correspondent-elles?

Les bâtiments en blanc sont ceux qui sont protégés. En rose et en orange, ce sont ce qu’on appelle des volumétries, des surfaces à disposition. Il s’agit en l’occurrence de terrains en DDP, en droit de superficie. Les entreprises louent le terrain et construisent leur bâtiment. Le gros avantage avec AgriCo, c’est que le bâtiment peut être construit avec une emprise au sol allant jusqu’à 85 % de la parcelle, avec les services liés, les équipements et la logistique. Et ceci, contrairement à une parcelle normale qui ne peut être construite que sur 70 % de la surface.

Dans cette zone orange, les terrains sont compris entre 3000 et 5000 m2 et constructibles jusqu’à 12 mètres de hauteur. Et dans la partie rose, des parcelles de 10 000 m2 jusqu’à 20 à 25 mètres de haut. Le bâtiment qui existe actuellement sera détruit et les parcelles attribuées au fur et à mesure de l’arrivée des demandes. Les bâtiments qui sont rénovés doivent être mis aux normes agroalimentaires, qui sont assez exigeantes. Certains bâtiments non protégés seront démolis et reconstruits plus grand et plus haut afin de permettre une meilleure densification. Un bâtiment permet d’accueillir certaines entreprises qui sont des start-up en phase de lancement et qui ont besoin de surfaces pour faire des essais. Nous les accueillons de manière provisoire dans ce bâtiment et à terme, nous pourrons leur proposer des surfaces pour leur production. Sur le site, on trouve aussi des granges en bois. Un agriculteur nous en a acheté une et il y en a encore deux à disposition des intéressés. La maquette est bien sûr adaptée en fonction des changements et des mises à l’enquête.

Le grand projet agroalimentaire communiqué en juillet est déjà représenté sur la maquette?

Oui, le voici dans cette zone rose de 98 000 m2. Il s’agit d’un atelier de transformation de volaille. L’usine à Courtepin ne peut plus être agrandie et une importante mise aux normes est devenue nécessaire. Cela représente beaucoup d’emplois. Il faudra compter un certain temps pour dépasser les oppositions. Une mise en service pour 2028-2029 est actuellement envisagée. Dans le village, le projet est perçu comme porteur, en particulier de la part des nombreuses personnes qui ont travaillé sur ce site.

Intermède. L’Établissement cantonal de promotion foncière (ECPF) a annoncé – c’était le 5 juillet dernier – la mise à l’enquête et communiqué sa vision du projet. En tout, les différentes mises à l’enquête représentent des investissements publics et privés proches de 500 millions de francs, dont 80 millions pour l’ECPF et environ 400 millions pour le nouvel atelier de transformation de volaille de Micarna, qui remplacera celui de Courtepin. Ce montant s’ajoute au plus de 35 millions de francs d’ores et déjà investis sur le site. À la fin des travaux, le nombre d’emplois passera alors de 120 actuellement pour une trentaine d’entreprises, à plus de 700, avec un objectif à terme de plus de 1600 emplois.

La logistique, humaine et de marchandises, a-t-elle fait l’objet de grands préparatifs?

Oui, les prochaines étapes passent par la construction d’un parking couvert à étages pour les clients et les visiteurs, que nous avons mis à l’enquête. Les navettes emmèneront les gens dans les différents espaces de production. Pour éviter de voir des camions passer en plein centre du site, et du village de Saint-Aubin, le trafic est dirigé vers la zone industrielle de Domdidier depuis la sortie d’autoroute. Sur le site, une route périphérique est construite pour amener les livraisons depuis l’arrière des bâtiments, ce qui permettra de garder le cœur du site en zone piétonne. Il s’agit d’un plan d’aménagement cantonal réalisé en 2018, mis à l’enquête, puis validé. Ce qui profite à toutes les entreprises qui viennent s’établir sur le site.

La convivialité, un élément essentiel sur un site comme le vôtre?

Oui, le restaurant permettra de créer des synergies parce qu’en définitive, c’est l’une des choses les plus importantes. En attendant, un traiteur nous livre tous les jours des repas chauds. Nous avons aussi un projet de centre de conférence jusqu’à 300 personnes parce que cela n’existe pas dans la région. Pour cela, nous devrons nous entourer de partenaires.

Quels sont les autres activités?

Nous avons aussi une association de pétanque et la plus grande association de airsoft en Suisse romande, la Romandie Airsoft team qui s’entraîne dans des anciens locaux qui seront détruits! Il y a aussi des exercices de polices et d’ambulanciers. Toutes ces activités ne pourront pas revenir, mais une autre zone industrielle se construit à proximité de la route des Vernettes. C’est une solution pour les entreprises qui n’entrent pas dans notre stratégie. Certaines sont chez nous en attendant de s’installer à côté. J’ai le peintre du village, des boxes pour une association qui envoie du matériel en Afrique, ce genre de choses.

Comment se passent les essais sur les terrains agricoles?

Un agriculteur gère les surfaces pour les entreprises qui veulent faire des essais en plein terrain. On regarde avec le fermier les parcelles qui peuvent être mises à disposition, si c’est lui qui fait les essais ou si les entreprises veulent le faire elles-mêmes. C’est un service que nous proposons. Par exemple, nous avons une start-up qui utilise des abeilles pour lutter contre les maladies des cultures de manière ciblée par le processus naturel de pollinisation. Ils sont organisés pour le faire eux-mêmes avec un apiculteur de la région. Ou des essais sur ce qui permet d’améliorer la résistance et la régénération des terrains agricoles lors de la présence de chevaux. C’est un essai réalisé avec la Confédération.

Vous avez aussi un projet de tour?

Oui, elle devrait faire 60 mètres de haut, c’est nettement plus que le silo qui était là avant. Il faut qu’on ait assez de demandes pour lancer les travaux. Ce serait pour des services, de la communication, du marketing. Il faudra voir comment la demande évoluera. Déjà, on peut constater que de nombreuses entreprises ont besoin d’un étage complet pour la production et de quelques bureaux, mais pas forcément de tout le deuxième étage, qu’elles sous-loueraient volontiers.

Qu’est-ce qui vous passionne?

Tout est à créer. C’est fabuleux. On est une équipe aussi. Mon métier, c’est d’attirer les entreprises, de susciter l’enthousiasme, je les rencontre, on analyse les besoins, on essaie de trouver le bon espace pour leur projet. Ici, le fait d’être tous dans le même milieu, on peut mettre en contact les gens d’une start-up qui ne connaissent pas forcément toutes les normes avec des gens qui ont plus d’expérience et peuvent les conseiller. On a aussi des projets communs qui se créent. Par exemple, l’entreprise qui produit des insectes a des déchets qui sont utilisés dans un engrais. On a fait des essais en plein sol et c’est une autre entreprise qui fait les essais. C’est un bel exemple de synergie. On est tous sur le même toit et on a des échanges, on a les espaces et on peut concrétiser les choses sur place.

Interview: François Othenin-Girard

www.agrico.swiss

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