Publié le: 8 avril 2022

Assainir d’urgence

RÉVISION DE L'AVS – Les trous qui se creusent dans le financement de l’AVS sont redoutables. Refuser les correctifs nécessaires reviendrait à se placer dans une position dangereuse.

«Les prévisions sont difficiles – surtout lorsqu’elles concernent l’avenir». Cette expression bien tournée, attribuée à Karl Valentin (cabarettiste allemand, 1882–1948, ndt) s’applique tout particulièrement à l’AVS. Un effondrement inattendu de l’emploi peut entraîner une baisse de quelques centaines de millions de francs des recettes provenant des cotisations salariales, ce qui peut rapidement transformer un excédent de recettes attendu en un déficit.

Les revenus des placements sont particulièrement difficiles à prévoir. Et ceux-ci pèsent lourd dans l’AVS, dont le stock de capital s’élève à prèsde 50 milliards de francs. En décembre dernier, l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) a publié des prévisions qui tablaient sur des revenus du capital de 774 millions de francs pour 2021. Grâce à une année de placement particulièrement réjouissante, les revenus effectifs du capital devraient s’élever à environ 2 milliards de francs. Les comptes de l’AVS s’en trouvent évidemment nettement améliorés à court terme.

La tendance Ă  long terme est claire

La révision de l’AVS, sur laquelle nous voterons le 25 septembre, est-elle pour autant devenue obsolète? Ne faut-il voir dans les déficits annoncés qu’une exagération pessimiste de la part de l’administration et du camp bourgeois. Les problèmes de financement de l’AVS ne se résoudront-ils pas au final d’eux-mêmes?

Pas du tout! À court terme, il y a toujours eu des écarts plus ou moins importants par rapport aux prévisions de bouclement de l’AVS. Et il en sera toujours ainsi. Mais la tendance sur le long terme est claire: elle nous oblige à agir vite. Nier cette réalité et refuser les réformes, c’est faire preuve de négligence et mettre en jeu de manière bien légère la sécurité financière de notre principale institution sociale.

Selon les prévisions de l’OFAS publiées à mi-décembre 2021, nous devons en effet nous attendre à des résultats d’exploitation négatifs de plusieurs centaines de millions d’ici trois ans. En fonction de l’évolution à court terme, ces déficits pourraient même se transformer en un léger excédent. Pour 2028, on s’attend alors déjà à un résultat d’exploitation négatif de l’ordre de 3,3 milliards de francs. Et là, une chose est sûre: cet excédent de dépenses ne se transformera certainement plus en bénéfice. Dans le cas d’une évolution idéale, le déficit prévu peut tout au plus se réduire à 2 milliards de francs. Mais il peut tout aussi bien atteindre cinq milliards, voire plus.

Un déficit de financement gigantesque

Après 2028, les déficits continueront de se creuser. Et ils le feront de manière exponentielle. Par conséquent, d’ici 2036 environ, tout le stock de capital de l’AVS, qui s’élève actuellement à près de 50 milliards de francs, sera entièrement grignoté. Comme nous l’avons dit, les prévisions ne sont jamais exactes. Il se peut que les fonds de l’AVS suffisent jusqu’en 2038, mais peut-être aussi jusqu’en 2034 seulement.

Cela ne change rien à cette situation effrayante! Mais la vérité toute nue est malheureusement encore plus désastreuse. UBS a récemment calculé, en collaboration avec l’Université de Fribourg-en-Brisgau, que les prévisions de rentes AVS – calculées selon le droit en vigueur – dépasseront les recettes futures de 900 milliards de francs. Cette lacune de financement correspond à environ 126 % du produit intérieur brut actuel, soit dix-huit fois le montant des recettes annuelles actuelles de l’AVS.

Un assainissement urgent

Tous ces chiffres montrent clairement que l’AVS doit être assainie de toute urgence. Avec le projet AVS 21, une première étape de cet assainissement est prévue. Elle doit permettre d’améliorer le résultat d’exploitation de l’AVS de deux bons milliards de francs par an. Cela suffira à maintenir l’équilibre des finances de l’AVS jusqu’en 2030 environ. Ensuite, d’autres réformes encore plus efficaces seront nécessaires. AVS 21 est importante et inévitable. Mais elle est aussi insuffisante, car elle réduit «seulement» le déficit de financement de l’AVS de 900 à 650 milliards de francs.

Nos retraités nous sont chers et comptent à nos yeux. C’est pourquoi nous devons assainir d’urgence les finances de l’AVS et garantir les rentes futures. Mais notre jeunesse doit aussi nous tenir à cœur. Nous ne devrions pas lui léguer des œuvres sociales fortement déficitaires et des chèques AVS sans provision d’un montant vertigineux. Un «oui» à AVS 21 est indispensable. Kurt Gfeller, usam

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